- AIMANTS PERMANENTS
- AIMANTS PERMANENTSLes aimants permanents sont des corps ferromagnétiques qui, une fois aimantés, conservent un certain état magnétique dont l’effet le plus sensible est d’attirer un morceau de fer.C’est en 1600 que paraît le premier ouvrage sur les aimants: De magnete . Son auteur, William Gilbert, essaya de créer des aimants artificiels, en utilisant le champ magnétique terrestre pour magnétiser des barres de fer. La découverte par Hans Christian Œrsted en 1820 de l’électromagnétisme, c’est-à-dire du champ magnétique créé par un courant électrique, freina pour un temps l’étude des aimants permanents. Quelques améliorations techniques furent apportées à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, notamment dans la fabrication d’alliages magnétiques. Cependant, ce sont les tentatives d’explication théorique du magnétisme par Pierre Curie, Paul Langevin, Pierre Weiss et plus tard Louis Néel qui donnèrent un regain d’intérêt aux aimants permanents. L’année 1931 fait date avec la découverte par le Japonais Mishima des alliages fer-nickel-aluminium qui sont à la base de l’essor prodigieux de cette branche de l’industrie. Les domaines d’applications des aimants permanents sont innombrables. Les plus importants sont: l’électronique, les télécommunications, l’électro-acoustique, l’électrotechnique et les instruments de mesure, enfin les appareils de contrôle; la recherche moderne les utilise également dans les spectrographes de masse et les accélérateurs de particules.1. GénéralitésDéfinitions généralesLorsqu’on place un matériau ferromagnétique de volume v dans un champ magnétique でe , il prend un moment magnétique ぬ. On définit en tout point une intensité d’aimantation ou aimantation ど; si la substance est uniformément aimantée, ぬ = どv . On représente (fig. 1), symboliquement, l’existence du vecteur ど par des charges + et 漣 (ou pôles nord et sud) réparties à la surface et dans le volume de la substance. Ces pôles créent à leur tour un champ magnétique ou champ démagnétisant でd dirigé des pôles nord vers les pôles sud donc de sens contraire à ど. Pour un corps uniformément aimanté dont la surface est ellipsoïdale, でd est aussi uniforme et proportionnel à ど:N est le coefficient de désaimantation, constant pour une direction d’aimantation donnée.Dans les applications d’aimants permanents, on parlera plutôt d’induction magnétique ち que d’aimantation ど et on écrira:où で, champ magnétique qui règne à l’intérieur de l’aimant, est égal à la somme géométrique des champs magnétiques appliqué et démagnétisant. Par analogie avec le flux hydraulique, on définit alors un flux d’induction magnétique à travers une surface s :il a la propriété d’être conservatif:Ce flux magnétique pourra être utilisé dans tout l’espace environnant l’aimant.Cycle d’hystérésisSi l’on part d’un corps désaimanté (J = 0) et qu’on le place, à une température déterminée, dans un champ magnétique extérieur que l’on fait croître progressivement, on peut tracer (fig. 2) les caractéristiques J (H) et B (H) du matériau, H étant le champ qui règne à l’intérieur de la substance. Lorsque H croît indéfiniment, on atteint l’aimantation à saturation Js du matériau à la température .Quand on fait décroître H, les courbes représentatives de J et de B ne passent pas par les mêmes points et, au moment où H est nul, il subsiste une certaine induction, dite induction rémanente , Br = 4 神Jr . Puis, le champ intérieur devenant négatif, on parvient à annuler B et J pour les valeurs B Hc et J Hc de H. J Hc est le champ coercitif d’aimantation , B Hc est le champ coercitif d’induction, ou champ coercitif Hc . Dans le deuxième quadrant de la figure, 4 神J 礪 B puisque H 麗 O, par suite, en grandeur on a J Hc 礪 Hc . Cette différence entre les deux valeurs des champs coercitifs, assez peu importante pour la plupart des matériaux (quelques centaines d’ampères par mètre pour les aimants fer-cobalt-nickel-aluminium), devient considérable dans certains cas. Par exemple pour le silmanal (Ag - Mn - Al), Hc = 43 800 A 練 m-1, J Hc = 533 200 A 練 m-1.En poursuivant le tracé de la courbe, on passe par les points 漣 Bs , 漣 Br , + Hc , + Bs ; on a décrit le cycle d’hystérésis.Grandeurs caractéristiques des aimants permanentsD’une façon générale, un aimant permanent est utilisé pour produire un champ magnétique He de valeur déterminée, dans un entrefer de longueur l e et de section Se données. La figure 3 représente schématiquement un circuit magnétique classique avec un aimant de longueur moyenne l a et de section Sa . En appliquant à ce circuit les deux équations fondamentales de la magnétostatique, c’est-à-dire le théorème d’Ampère (face=F0019 咽l e で 練 轢dl = 0 le long d’un contour fermé) et la conservation du flux (div ち = 0), on obtient Ha 練 l a + He 練 l e = 0, d’où Ha = 漣 (l e /l a ) He et Ba Sa = Be Se .On voit que, dans l’aimant, l’induction Ba est positive et le champ Ha est négatif. La partie utile du cycle d’hystérésis d’un aimant est donc celle qui est située dans le deuxième quadrant (fig. 4), c’est-à-dire celle qui est comprise entre les points Br et Hc . D’une façon générale, l’aimant permanent travaille toujours sous l’influence de son champ démagnétisant. Lors du tracé du cycle d’hystérésis, on a dépensé, pour aimanter le matériau, une certaine énergie proportionnelle à l’aire du cycle.Quand on supprime le champ magnétisant, l’aimant conserve une partie de cette énergie sous forme d’énergie magnétique disponible pour utilisation dans l’espace environnant. On démontre que la densité d’énergie magnétique dans un milieu est égale à BH/8 神.Un aimant dont le point de fonctionnement est en A (ce qui signifie qu’à l’intérieur de cet aimant règnent l’induction Ba et le champ Ha , coordonnées de A) sera donc capable de fournir une énergie proportionnelle au produit Ba Ha , c’est-à-dire proportionnelle à l’aire du rectangle représenté sur la figure. Plus l’aire de ce rectangle sera étendue, plus l’énergie disponible sera élevée. Pour un matériau donné, il existe sur le cycle un point pour lequel le produit BH est maximum: c’est «le point de (BH)max ». Il est évident qu’un aimant donné produira le maximum d’énergie si, d’une part, son cycle est étendu – donc si Br et Hc sont élevés – et, d’autre part, s’il est possible d’inscrire sous ce cycle un rectangle de dimensions importantes – donc si le cycle est lui-même rectangulaire. En résumé, les trois grandeurs fondamentales d’un aimant sont: l’induction rémanente Br , le champ coercitif Hc , le produit d’énergie maximum (BH)max .Origines de l’hystérésis magnétiqueLe développement des matériaux à aimants permanents a pour but de rechercher le (BH)max le plus élevé possible de façon que l’aimant soit le plus efficace possible. Accroître le (BH)max revient d’abord à accroître Br et Hc . On ne peut espérer une augmentation considérable de l’induction rémanente parce que la limite des aimantations à saturation de la plupart des matériaux ferromagnétiques est connue (la plus élevée, 2,4 teslas, étant celle d’un alliage fer-cobalt à 34 p. 100 de cobalt) et il est peu probable que ces valeurs soient dépassées dans de larges proportions.Il reste donc la possibilité d’augmenter la valeur du champ coercitif, et des progrès considérables ont été réalisés dans ce sens depuis les aciers au chrome dont le champ coercitif n’atteignait pas 19 900 A 練 m-1; actuellement, on arrive à 159 150 A 練 m-1 avec des aimants fer-nickel-cobalt-aluminium et même 318 300 A 練 m-1 pour l’alliage équi-atomique platine-cobalt, cependant que les énergies sont passées de 15 900 T 練 A 練 m-1 à 63 700 T 練 A 練 m-1 et même 79 600 T 練 A 練 m-1.Ces progrès ont été accomplis autant par l’habileté des techniciens que par l’avancement de la théorie. En effet, l’explication théorique complète des phénomènes d’hystérésis magnétique reste à faire, bien que des succès probants aient été obtenus et que l’on commence à apercevoir le chemin qui devra être suivi.L’hystérésis magnétique peut être considérée comme la résistance à la désaimantation. L’existence des domaines magnétiques de Weiss étant maintenant reconnue, on admet généralement que l’aimantation se manifeste sous l’action de deux mécanismes:– le déplacement des parois de Bloch qui séparent les domaines, phénomène apparaissant de préférence aux faibles valeurs du champ;– la rotation de l’aimantation des domaines se produisant pour les valeurs élevées du champ appliqué.Dès lors, un matériau magnétique ayant été aimanté présentera de l’hystérésis si les déplacements de parois ou si les rotations de l’aimantation sont rendus irréversibles. Les premiers travaux théoriques s’attachèrent à trouver les causes empêchant les mouvements de parois, c’est-à-dire les «accidents de parcours» que peut trouver une paroi en mouvement, accidents qui se traduisent par des variations d’énergie superficielle des parois.Ainsi Joseph Becker (1939) attribue l’hystérésis à des variations de tensions à l’intérieur du matériau, provoquées par exemple lors de la précipitation d’une phase d’une solution solide. Kersten (1943) introduit la notion de cavités ou d’inclusions non magnétiques jouant le rôle d’obstacles à la propagation des parois. Reprenant ces idées et les complétant, Louis Néel (1944-1946) suppose une distribution aléatoire des tensions et des inclusions non magnétiques provoquant des fluctuations dans l’intensité et la direction de l’aimantation spontanée à l’intérieur des domaines élémentaires. Il en résulte, à l’intérieur d’un matériau hétérogène, l’existence de pôles libres, et de champs de dispersion dont les variations d’énergie, avec la position de la paroi, sont beaucoup plus élevées que celles de la tension superficielle de la paroi.Le calcul des ordres de grandeur des champs coercitifs de matériaux obéissant à ce mécanisme (aciers à durcissement par trempe, alliages à durcissement par précipitation) est en accord satisfaisant avec les valeurs expérimentales.Entre les années 1945 et 1950, de nouvelles idées apparaissent, Louis Néel, Charles Kittel, Stoner, E. P. Wohlfarth, Guillaud, introduisant la notion de monodomaines dont les dimensions sont telles qu’une paroi ne peut plus se former. À ces particules sont associées diverses énergies (magnétocristalline, magnétoélastique, de champ démagnétisant de forme) qui s’opposent à la rotation des moments magnétiques élémentaires, seul mécanisme d’aimantation possible. Ces énergies, déterminant le couple qu’il faut exercer pour faire tourner l’aimantation, conditionnent ainsi la valeur du champ coercitif.Immédiatement, des réalisations pratiques suivent les idées théoriques, et on assiste à l’éclosion d’un nouveau groupe d’aimants dans lesquels on agglomère des particules monodomaines (poudres) dont on essaie de rendre parallèles entre elles les aimantations.Cette nouvelle théorie «des grains fins» permet aussi d’éclairer partiellement certains phénomènes d’hystérésis inexpliqués (cas des alliages fer-nickel-cobalt-aluminium) mais le problème n’est pas entièrement résolu et la théorie complète de l’hystérésis magnétique reste à établir.2. Matériaux à aimants permanentsParmi les différentes méthodes de classement que l’on peut adopter pour exposer les propriétés des nombreux matériaux à aimants permanents, la plus naturelle est de former des groupes basés sur l’origine de l’hystérésis magnétique et sur la valeur du champ coercitif d’induction. Le classement ainsi établi correspond à des modes de préparation et à des propriétés physiques et mécaniques assez bien caractérisés. On distinguera alors:– les aciers à durcissement par trempe;– les alliages à durcissement par précipitation;– les alliages à durcissement par diffusion;– les alliages à durcissement par réaction désordre-ordre;– les aimants à base de poudres.Les aciers à durcissement par trempeSi la «pierre d’aimant», une variété de la magnétite Fe34, est un aimant naturel connu depuis la plus haute antiquité, les aimants artificiels les plus anciens sont les aciers au carbone trempés. Au cours de la trempe, l’austénite est transformée en martensite et cette structure, à cause de la distribution irrégulière des atomes de carbone dans les interstices du réseau, présente un état de tension et un fort degré d’hétérogénéité conférant le champ coercitif.Les propriétés magnétiques des aciers sont fortement accrues par addition de tungstène (jusqu’à 6 p. 100), de chrome (jusqu’à 6 p. 100), de colbalt (jusqu’à 40 p. 100). Elles restent cependant limitées: Br 麗 1 tesla, Hc 麗 19 900 A 練 m-1, (BH)max 麗 7 957 T 練 A 練 m-1.Ces matériaux ont été les seuls qui aient existé pendant plus d’un siècle. Ils sont complètement abandonnés de nos jours à cause, d’une part, de leurs performances magnétiques faibles et, d’autre part, de leur instabilité: ils ne supportent pas les élévations de température et, même à température ambiante, ils se désaimantent au cours du temps par suite de la lente décomposition de la martensite.Les alliages à durcissement par précipitationEn 1931-1932, Seljesatek, Rogers, Köster ont suggéré que le phénomène de précipitation d’une seconde phase à partir d’une solution sursaturée pouvait être utilisé pour conférer une grande dureté magnétique à certains alliages. Effectivement, des matériaux de ce type ont été commercialisés à partir des systèmes métalliques suivants:– argent-manganèse-aluminium (1931) ou silmanal;– fer-molybdène-cobalt (1932) donnant le remalloy (ou comalloy);– cuivre-nickel-fer (1935) donnant les cunife I et II;– cuivre-nickel-cobalt (1938) donnant les cunico I et II;– fer-cobalt-vanadium (1940) donnant les vicalloy I et II.Ces alliages se prêtent tous à l’usinage; ils sont en effet malléables et ductiles; on peut les mettre en forme à froid ou à chaud par laminage ou étirage et obtenir des bandes ou des fils dans lesquels sont découpés les aimants.Leur mode de préparation consiste à fondre les métaux en un lingot que l’on porte à une température d’homogénéisation supérieure à 1 000 0C et que l’on trempe à cette température. Le lingot est alors soumis soit à un traitement mécanique suivi d’un revenu, soit à un revenu suivi d’un traitement mécanique et d’un second revenu. Le revenu a pour effet de précipiter la seconde phase cependant que le traitement mécanique induit un état de tension favorable à l’accroissement de l’hystérésis magnétique. Les propriétés magnétiques sont fonction du taux de réduction au cours des opérations mécaniques (cf. tabl. 1).Signalons que le vicalloy II, contenant en poids 13 p. 100 de vanadium, est rendu anisotrope par laminage à froid, le degré d’anisotropie et les valeurs magnétiques étant fonction du taux de réduction en section. Les cunife sont également anisotropes.Les alliages à durcissement par diffusionLa découverte en 1931 par Mishima d’un alliage de fer, de nickel et d’aluminium (30 p. 100 Ni, 12 p. 100 Al, 58 p. 100 Fe) présentant des propriétés d’aimant permanent intéressantes (Br = 0,95 T, Hc = 34 220 A 練 m-1) ouvre la voie à une nouvelle classe de matériaux désignés sous les noms alni et alnico. Leur importance devient telle qu’ils supplantent rapidement tous les autres types d’aimants, en particulier les aciers trempés; ce n’est qu’en 1952 qu’un concurrent sérieux se présentera avec l’aimant en ferrite de baryum.Les propriétés magnétiques remarquables des alliages du groupe Fe-Ni-Al ont fait l’objet de nombreuses recherches. Cependant l’explication du mécanisme de durcissement magnétique n’est pas encore entièrement satisfaisante. On admet le processus suivant: aux températures supérieures à 1 250 0C, les alliages sont constitués d’une phase unique 見 de structure cubique centrée, qui se décompose au cours d’un refroidissement à vitesse modérée entre 900 et 800 0C, en deux phases 見1 et 見2 toutes deux cubiques centrées, 見1 fortement ferromagnétique étant dispersée dans une matrice faiblement ferromagnétique, la phase 見2. La phase 見1 contient surtout du fer et se présente sous forme de particules aciculaires ayant les dimensions d’un monodomaine. Il y a diffusion d’atomes à travers le réseau, d’où naissent des variations locales de composition entraînant le durcissement. Le mécanisme d’aimantation se produit alors uniquement par rotation du vecteur aimantation.Pour les alliages alni (fer-nickel-aluminium), la température de démixion de la phase 見 en 見1 + 見2 est supérieure au point de Curie de l’alliage. On améliore les propriétés magnétiques des alni en ajoutant certains éléments; ainsi l’addition de cuivre et de cobalt permet de passer des alliages Fe-Ni-Al aux alnico isotropes (cf. tabl. 2) à propriétés améliorées. Le point de Curie augmente avec la teneur en cobalt et sa valeur devient, pour certaines compositions, supérieure à la température de la réaction de démixion 見見1 + 見2. Il est alors possible (Oliver et Shedden, 1938) d’orienter les domaines élémentaires selon une direction de facile aimantation en appliquant un champ magnétique au cours du refroidissement.On obtient ainsi les alnico orientés ou anisotropes dont les propriétés magnétiques – surtout Br et (BH)max – sont exaltées dans la direction du champ appliqué, au détriment des propriétés selon la direction perpendiculaire. On améliore encore le champ coercitif Hc en augmentant la teneur en cobalt jusqu’à 40 p. 100 et en ajoutant du niobium et surtout du titane jusqu’à 8 p. 100, bien que les additions de titane fassent baisser la valeur de B.Enfin l’amélioration la plus récente dans le domaine des alnico consiste à produire un alliage dont les cristaux sont allongés suivant la direction de facile aimantation (structure colonnaire ). Cet alignement s’obtient par cristallisation dirigée au cours de la solidification grâce à un gradient thermique et à un régime de refroidissement appropriés. Le traitement de refroidissement sous champ ultérieur (ou trempe magnétique) s’effectue alors dans la direction de la cristallisation. Les valeurs de Br et (BH)max sont considérablement améliorées par la structure colonnaire.Aux propriétés magnétiques excellentes des alnico – surtout en Hc et en (BH)max – on doit ajouter la stabilité remarquable dont ils font preuve tant au cours du temps qu’en fonction de la température ou des diverses actions démagnétisantes. À condition de leur faire subir un léger traitement de stabilisation, les aimants alnico conservent leurs propriétés magnétiques jusqu’à des températures de l’ordre de 550 0C. L’aimant devient ainsi un composant sûr de l’industrie, contrairement aux anciens aciers qui se désaimantaient progressivement au cours du temps.En contrepartie, les aimants alnico présentent des propriétés mécaniques qui rendent leur fabrication délicate; ils sont durs et cassants, même à haute température, et il n’est pas possible de les forger ni de les usiner. On les fabrique par fusion au four à induction puis coulage dans des moules de précision, les dimensions finales ne pouvant être obtenues que par meulage.Pour des pièces de faibles dimensions ou de forme compliquée, on peut utiliser les techniques de la métallurgie des poudres, par compression et frittage des poudres métalliques de fer, nickel, aluminium, cobalt, etc. La précision sur les cotes n’est pas meilleure et, de plus, les valeurs magnétiques des alnico frittés sont moins bonnes (surtout en Br et (BH)max ) à cause de leur densité plus faible.L’obtention de cotes précises peut être réalisée en agglomérant de la poudre d’alnico à de la résine. La valeur de Hc est à peu près conservée, mais Br diminue de 50 p. 100. Signalons que la totalité des compteurs de vitesse de voitures européennes comportent des aimants alnico agglomérés .Les alliages à durcissement par réaction désordre-ordreLa déformation de la maille cristalline et le réarrangement des atomes qui se produisent lors de la mise en ordre d’une solution solide désordonnée conduisent à un état de contrainte à l’intérieur du matériau qui est favorable à l’apparition d’une hystérésis magnétique.C’est le cas par exemple de l’alliage équi-atomique platine-cobalt (contenant 77 p. 100 de platine en poids) qui existe en phase désordonnée à structure cubique centrée au-dessus de 850 0C, et en phase ordonnée à structure tétragonale à faces centrées au-dessous de cette température. L’alliage subit une transition magnétique à 600 0C. Le point de Curie du matériau (500 0C), inférieur à la température de la réaction, ne permet pas l’orientation sous champ magnétique. L’aimant PtCo est donc isotrope.Les propriétés magnétiques de ce matériau sont remarquables (cf. tabl. 3) et en font l’aimant le plus puissant que l’on connaisse. De plus, il peut être usiné, même à l’état magnétiquement dur, par tournage, laminage, étirage. Si bien que, malgré leur prix de revient élevé, les aimants PtCo trouvent des applications dans les appareils miniaturisés pour l’électronique, les industries horlogère, acoustique, aéronautique et spatiale.Un autre exemple de matériau à réaction désordre-ordre se trouve, pour certaines compositions, dans les alliages manganèse-aluminium. Ainsi, l’alliage de composition 72 p. 100 Mn, 28 p. 100 Al à structure hexagonale à haute température se transforme à 700 0C en une phase tétragonale qui confère au matériau de remarquables propriétés magnétiques qui peuvent être améliorées encore par laminage sous gaine. Ce matériau en est encore au stade du laboratoire, mais il est susceptible de trouver certaines applications grâce à son champ coercitif Hc élevé, sa faible densité et le prix de revient réduit des matériaux de départ.Les aimants obtenus à partir de poudresEn application des théories sur les grains fins, les recherches se sont orientées vers la production d’aimants permanents à partir de poudres dont les dimensions sont de l’ordre de celles des monodomaines magnétiques. Le processus de fabrication comporte deux stades: la préparation de la poudre et l’agglomération par compression en présence ou non d’un champ magnétique, suivie d’un frittage pour donner au matériau une tenue mécanique suffisante. On est ramené à traiter des problèmes de métallurgie des poudres.Aimant manganèse-bismuthLe premier aimant fabriqué à partir de poudres a été élaboré en 1943, avant que la théorie des grains fins ne fasse son apparition. Il s’agit du composé intermétallique MnBi qui, cristallisant dans le système cubique, présente une anisotropie magnéto-cristalline très élevée. La préparation de la poudre est délicate à cause de la grande affinité du manganèse et du bismuth pour l’oxygène. La poudre est ensuite comprimée à chaud en présence d’un champ magnétique puissant de l’ordre de 159 憐 104 A 練 m-1. Un frittage ultérieur n’est pas nécessaire, si bien que des forces précises peuvent être réalisées. Mais le prix de revient élevé du bismuth, les difficultés de préparation des poudres et surtout la détérioration des propriétés magnétiques aux températures inférieures à l’ambiante limitent l’utilisation de ce matériau, malgré les valeurs élevées de ses caractéristiques magnétiques (cf. tabl. 4).Aimants en poudres de fer et de fer-cobaltDès 1946, Louis Néel proposa, à la suite de ses travaux sur les grains fins, une méthode de fabrication d’aimants à partir de poudres de fer et de fer-cobalt. La poudre obtenue par voie chimique est composée de grains à peu près sphériques d’un diamètre d’environ un dixième de micron. Elle est ensuite comprimée et frittée. Les performances atteignent celles des alnico isotropes. Malheureusement, la poudre est pyrophorique et les manipulations posent un certain nombre de problèmes. Les aimants PF1 et PF2, commercialisés en France, ne sont plus fabriqués maintenant.En 1955, Luborsky, Mendelsohn et Paine, utilisant la théorie sur l’anisotropie de forme, inventèrent un procédé de fabrication de poudres en fer et fer-cobalt de forme allongée (E.S.D.P.: elongated single domain particules ) par électrodéposition des particules sur une cathode de mercure. La poudre est compactée dans une matrice en plomb en même temps qu’un champ est appliqué. Aux États-Unis, ces aimants sont commercialisés sous le nom de Lodex, dont les propriétés dépendent du pourcentage de particules présentes dans la matrice. Théoriquement, ce type d’aimant peut atteindre (BH)max 力 397 850 T 練 A 練 m-1 avec Hc 力 318 300 A 練 m-1, mais son prix élevé limite son développement.Aimants en poudres de ferritesOn désigne, sous le terme général de ferrites, des céramiques qui sont des mélanges magnétiques d’oxydes renfermant l’oxyde ferrique Fe23 et dont le comportement obéit à la théorie du ferrimagnétisme de Néel. Leur résistivité élevée, supérieure à 102 行 練 cm, a permis un essor considérable de ces matériaux pour l’utilisation aux fréquences élevées. On distingue:– les ferrites douces , soit à structure spinelle du type MO, Fe23 où M est un ion divalent (Fe - Ni - Co - Cu - Mn - Zn - Cd - Mg), soit à structure grenat du type 3M23, 5Fe23, où M est l’yttrium ou un ion terre rare;– les ferrites dures à structure hexagonale isomorphe de la magnétoplombite, du type MO, 6Fe23 où M = Ba, Pb, Sr. Ce deuxième type de ferrite est caractérisé par une forte anisotropie magnétocristalline, la direction de facile aimantation étant dirigée selon l’axe sénaire; il est donc susceptible de fournir un matériau pour aimant permanent.Dès 1952, Philips produit des aimants en ferrite de baryum isotrope , préparé en mélange des oxydes Fe23 + BaO (ou du carbonate de baryum), produits peu coûteux et non stratégiques, suivi d’un compactage à la presse et enfin d’un frittage. Bien que l’induction rémanente de ce matériau soit faible (0,22 T), sa forte coercivité (Hc = 125 280 A 練 m-1) stimule les recherches. En 1954, on arrive à fabriquer un aimant ferrite anisotrope dans lequel les particules de ferrite de l’ordre du monodomaine, formées par préfrittage des oxydes, sont comprimées en présence d’un champ magnétique orienteur qui aligne les axes de facile aimantation parallèlement à la direction de compression. Les grandeurs magnétiques sont fortement augmentées, plusieurs nuances sont mises au point afin d’adapter le matériau à de nombreuses utilisations.Ces matériaux étant du type céramique sont évidemment fragiles et difficiles à usiner (meulage et rodage seuls possibles). De plus, leur induction est sensible aux variations thermiques et ils ne peuvent plus être utilisés, pratiquement, au-dessus de 100 0C.Une application intéressante des poudres de ferrite est la possibilité de les agglomérer dans un liant flexible (caoutchouc, ou matière plastique souple) donnant ainsi naissance aux matériaux magnétiques souples , livrables en feuille ou en ruban dans lesquels on découpe les pièces désirées.La tendance actuelle est de développer les moyens d’obtention des particules de taille désirée pour accroître les propriétés magnétiques. Enfin, on développe de nouvelles nuances, principalement les ferrites de strontium dont les performances sont supérieures à celles des ferrites de baryum (cf. tabl. 5).Importance relative des diverses nuances d’aimantsMalgré le nombre important de matériaux à aimants qui ont été énumérés, la grande majorité des utilisations fait appel à deux types seulement: les alnico et les ferrites. À elles deux, ces nuances représentent environ 95 p. 100 de la consommation mondiale, la répartition entre elles, suivant les pays, étant fonction des disponibilités en matières stratégiques. Ainsi, aux États-Unis et en Grande-Bretagne, 70 p. 100 environ de la production est constituée d’alnico, alors qu’en Allemagne on fabrique 60 p. 100 de ferrites. En France, les deux types sont à peu près également utilisés.Dans certains cas très particuliers, on emploie du platine-cobalt lorsque l’encombrement est strictement limité: horlogerie, missiles, électronique miniaturisée, micro-aimants, ou lorsque les facilités d’usinage de ce matériau sont nécessaires. De même le vicalloy est utilisé parfois pour son usinabilité ou sa forte induction rémanente (moteur à hystérésis). Les aimants à grains fins en fer et fer-cobalt sont des concurrents sérieux pour les alnico et les ferrites.Il faut mentionner enfin la découverte des remarquables propriétés des aimants à base de terres rares, notamment de l’alliage samarium-cobalt, dont le champ coercitif dépasse 650 000 A 練 m-1 et qui constitue une nouvelle série de matériaux pour aimants permanents.3. Applications des aimants permanentsIntroductionUn aimant permanent fournit à l’espace qui l’environne un certain flux magnétique ou, ce qui revient au même, il crée autour de lui un champ magnétique dont l’action peut s’exercer:– sur d’autres aimants ou corps ferro-magnétiques (forces d’attraction mécanique, forces d’orientation);– sur des courants électriques (transformation d’énergie électrique en énergie mécanique et réciproquement);– en tant que champ statique (déviation de particules, focalisation électronique, relais polarisés).Ces diverses fonctions ont été remplies pendant longtemps par les champs magnétiques créés par les courants: solénoïdes, électro-aimants. Mais les progrès remarquables accomplis dans le domaine des matériaux pour aimants permettent d’envisager le remplacement progressif de l’électro-aimant par l’aimant permanent donnant la même efficacité avec un encombrement trois à quatre fois plus faible, un poids réduit dans la même proportion et une grande simplicité de réalisation et d’emploi. Cette concurrence s’accentuera encore dans l’avenir grâce aux avantages que procure l’aimant:– l’aimant fonctionne sans courant permanent, il ne se produit donc aucun échauffement de bobinage, pas de panne subite dangereuse, pas de problèmes d’isolement, pas de transport de courant sur des engins mobiles ou sur des bobinages tournants;– la production d’un champ magnétique stable avec du courant impose des dispositifs de régulation coûteux et encombrants, alors que l’aimant peut être utilisé seul, et sa stabilité dans le temps et en température est souvent meilleure que celle de la plupart des composants de l’industrie;– l’aimant peut être utilisé là où le courant est rare: missiles, lieux géographiques désertiques;– les dispositifs d’aimantation et de désaimantation des aimants par impulsions brèves de courant électrique permettent de faire varier à volonté la valeur du flux magnétique.Les applications des champs magnétiques en électrotechnique et en électronique sont bien connues et des progrès sensibles ont pu être réalisés en utilisant les aimants permanents. Un domaine moins exploré, mais prometteur, est celui qui utilise la force d’attraction des aimants; l’amélioration des caractéristiques magnétiques a permis la mise en œuvre de toute une série de dispositifs mécaniques qui vont de la punaise magnétique pour panneaux d’affichage jusqu’aux mécanismes nobles que sont les engrenages, les paliers, les transmissions magnétiques. Il naît une «mécanique magnétique» qui utilise des forces de liaisons exclusivement magnétiques, caractérisées par l’absence de contact et de frottement et donc par:– l’absence d’usure entre les pièces et du bruit des mécanismes;– l’inutilité de lubrifier, qui permet un fonctionnement à toute température inférieure au point de Curie;– l’indifférence aux conditions de pression qui conduit à pouvoir travailler aussi bien sous vide qu’aux pressions les plus élevées.Quelques types d’applications des aimants permanentsLes aimants permanents trouvent des applications nombreuses en:– électronique et électro-acoustique : les lentilles magnétiques, les tubes hyperfréquences, les spectrographes de masse, les accélérateurs de particules, les haut-parleurs, les microphones, les téléphones, les télétypes, les appareils à enregistrement magnétique – magnétophones et magnétoscopes;– électrotechnique : dans les générateurs, les magnétos et volants magnétiques, les alternateurs, les moteurs de jouets, d’horlogerie, les moteurs à hystérésis, les moteurs d’électroménager, les moteurs à circuits imprimés, les relais, les interrupteurs, les contacteurs, les vannes, les thermostats, les régulateurs de pression.Ils jouent un rôle irremplaçable dans le fonctionnement des instruments de mesure : à cadre et à aimant mobiles (ampèremètres, voltmètres, galvanomètres), compteurs électriques ou de vitesse, magnétomètres, tachymètres, sismographes, électrocardiographes, horloges.Ils interviennent aussi de plus en plus dans les industries mécaniques : plateaux magnétiques de machines-outils, positionneurs de pièces, supports de pièces et d’outils, aimants de levage, trieurs, filtres, séparateurs magnétiques.On les trouve également dans de nombreux éléments de machines : paliers et suspensions magnétiques, freinage de mouvement, transmissions, accouplements, embrayages, engrenages magnétiques (réducteurs et multiplicateurs de vitesse).Ils ont d’autre part toutes sortes d’utilisations : fermetures magnétiques, aimants de fixation (décoration, publicité, appliques murales), effets de répulsion, jouets et jeux magnétiques, appareils de prothèse dentaire.4. Évolution des aimants permanentsLes progrès considérables réalisés dans le domaine des matériaux à aimants permanents se manifestent par leur emploi croissant dans toutes les branches de l’industrie.Quelques laboratoires s’occupent d’améliorer encore les matériaux existants ou d’en découvrir de nouveaux.On étudie l’amélioration des alnico par tirage de monocristaux à partir de l’alliage fondu; des (BH)max de l’ordre de 95,5 憐 103 T 練 A 練 m-1 ont été obtenus. L’étude systématique de l’influence des additions et des réactions de transformation des phases permet d’atteindre Hc 礪 159 憐 103 A 練 m-1.On essaie également d’améliorer les ferrites par recherche de la granulométrie optimale d’un meilleur alignement des particules, et de nouveaux oxydes (ferrites de strontium).On procède à des études sur les aimants en poudres de fer et fer-cobalt qui, théoriquement, permettront d’atteindre les énergies les plus élevées (BH)max 力 398 憐 103 T 練 A 練 m-1.On met au point enfin de nouveaux matériaux: alliages cobalt-terres rares (à anisotropie magnétocristalline élevée); composés dits «à anisotropie d’échange» ou à cycle d’hystérésis dissymétrique, obtenus par refroidissement sous l’action d’un champ, au-dessous de la température de Néel: tel est le cas du matériau formé par compression de particules de cobalt recouvertes d’oxyde de cobalt. Les points de Néel des matériaux connus sont malheureusement tous inférieurs à la température ambiante.Les recherches se poursuivent dans les divers laboratoires du monde entier, tant dans le domaine théorique que technologique. Il est probable qu’une meilleure compréhension des phénomènes conduira à de nouveaux progrès intéressants dans un avenir prochain.
Encyclopédie Universelle. 2012.